Six jours de single-tracks dans le Haut-Atlas - Etape 1

Traverser le Haut Atlas en recherchant les plus beaux single-tracks... Vaste programme, aurait dit le Général (ou le Sultan) ! On croirait volontiers que c'est simple, à une époque où Internet sait tout de nos moindres faits et gestes. Mais la magie des GAFAS, des satellites et des données cartographiques ou numériques de terrain (si commune chez nous désormais, depuis l'invention des traces collaboratives qui ne permettent même plus de se perdre…) n'opère guère au Maroc. En effet, on trouve en ligne (toutes langues confondues) assez peu de choses intéressantes (vue la taille immense du pays et de ses montagnes) :

- Quelques rares balades à la journée (dont une d'un intérêt exceptionnel, qui a soldé le dernier jour de notre voyage et que j'évoquerai en toute fin de descriptif - étape 6 -), ainsi que des raids essentiellement sur pistes (exploitant, il faut bien le dire, un réseau immense, qui se prête donc à de multiples possibilités et variantes, toujours pittoresques et dépaysantes).

- Le récit de pseudo-exploits sportifs "jamais réalisés avant", du genre première descente à VTT d'un 4000 africain, avec au choix le M'Goun ou le Toubkal (notons que les deux pointes du Djebel Ouanoukrim, respectivement 4083 m et 4089 m d'altitude, n'ont pas encore été dévalées et attendent donc les amateurs et leurs vidéos postées sur YouTube !), exploits se caractérisant en général par 90 % de portage et 10 % de roulage…

Quant à nous, on voulait découvrir le Queyras ou la Zona Zero d'Afrique du Nord, c'est-à-dire trouver du sentier roulant, du sentier roulant et du sentier roulant ; et cela après avoir pris nos billets d'avion sans avoir la moindre idée des endroits où il fallait aller, en dehors (pour ce qui me concerne) des vagues souvenirs de certains chemins parcourus à pied il y a longtemps et de sites que j'avais envie de revoir (vallées de la Tessaout et des Aït Bouguemez, notamment)…

Le résultat a dépassé nos espérances, notamment dans la première (et plus longue) partie de notre séjour, entre le col routier du Tizi N'Tichka (sur la grande ligne de partage des eaux et la principale route traversant l'Atlas, entre Marrakechet Ouarzazate) et le massif du M'Goun. Et ce, moyennant une chance insolente côté météo (on n'a eu que trois gouttes de pluie, entre 2 séquences diluviennes ayant eu lieu avant et après notre séjour !), un bol faramineux question incidents mécaniques (aucun pépin en 6 jours et pour 6 cyclistes, alors même que le terrain est tout de même compliqué) et grâce enfin à un parcours largement dégrossi par notre (nouvel) ami et accompagnateur Brahim, qui s'est révélé parfait au moins 5 jours sur 6 (puis lors de nos 3 dernières journées, au pied cette fois des crêtes du Toubkal).

Voici le détail de nos aventures (avec 6 nuits, 3 sous tente - notre guide assurant par ailleurs toute la logistique du couchage, des repas et de l'acheminement des bagages - et 3 en gîte). Les 6 traces correspondantes conservent parfois certains errements ou allers et retours que j'ai commis (et que nos suiveurs n’auront pas de mal à ignorer), mais fournissent en l'état une base à la fois opérationnelle et sans doute proche de l'idéal (dans l'optique choisie de privilégier un maximum de monotraces).

A/ REMARQUES GENERALES

1/ Mon objectif serait d'améliorer cet itinéraire pour créer, en mode collaboratif, une traversée VTT (et autant que possible monotrace à la descente) du Haut-Atlas. N'hésitez donc pas à améliorer dans les mois qui viennent ce parcours (et à me faire connaître vos propositions et commentaires, que je pourrai alors inclure dans des versions ultérieures et progressivement révisées). Les montagnes du Maroc (où la fréquentation touristique est devenue parfaitement marginale depuis quelques années) ont en effet bien besoin d'un regain d'attrait et de publics divers (dont celui des vététistes amateurs de splendides aventures, au dépaysement incomparable) pour améliorer leur situation socio-économique et faire vivre en particulier les quelques prestataires courageux (hébergeurs, muletiers, guides) qui résistent encore au marasme…

2/ A noter que cette traversée a été réalisée entre le 28 avril et le 3 mai 2018, en l'absence totale de neige (y compris à 2900 m d'altitude, point culminant de notre raid - au cours de sa cinquième étape -), celle-ci ne couronnant les sommets, à ce moment de l'année et en ce début de printemps, qu'à partir de 3200 m (et ce, semble-t-il, depuis la mi-avril). Le printemps et l'automne paraissent donc les saisons idéales pour accomplir ce raid (il fait en général trop chaud en été et trop froid en hiver - avec en sus un risque de neige alors élevé -).

3/ Trois problèmes principaux à résoudre pour ce genre de raid (et que nous avons résolus après quelques tâtonnements) :
- Se procurer les cartes permettant de déterminer et de visualiser l'itinéraire.
- Acheminer son vélo au Maroc.
- Trouver une logistique opérationnelle (assurant couchages, repas et transport des bagages, en particulier).

1/ LES CARTES
Si l'on peut trouver dans le commerce quelques cartes (au 1/100 000 et vraiment pas terribles) des massifs du M'Goun et du Toubkal, il n'y pas de cartographie à jour et couvrant notre itinéraire dans son intégralité. On se débrouille néanmoins avec les solutions pratiques suivantes :

- Sur un premier site, on a accès à un ensemble de feuilles au 1/50000 et 1/100000, couvrant une grande partie du Maroc et notamment ses massifs montagneux (type fonds IGN ; mais anciennes). Ces cartes ne sont malheureusement pas à jour côté routes, pistes et sentiers : https://jemecasseausoleil.blogspot.fr/2017/06/cartes-du-maroc.html

- Grâce à un second site, on peut télécharger sur son GPS des fonds de carte (plus à jour), comprenant pas mal des sentiers que nous avons empruntés : http://alternativaslibres.org/fr/download.php?file=gmapsupp_Morocco_Topo.zip. Utile (notamment en cas de brouillard, temps que nous n'avons toutefois pas expérimenté), car l'expérience montre que le tracé sur le terrain suit en général de très près ce qui est alors indiqué par le GPS, une fois téléchargés ces fonds.

- Enfin, il existe une solution payante de téléchargement de cartographie GPS (avec semble-t-il encore davantage de sentiers indiqués), expérimentée en sus par l'un d'entre nous (TopoActive Africa V4, à 49,99 euros).

A noter également (nous nous en sommes pas mal servis) que sur Viamichelin et Openstreetmap, on trouve enfin des cartes où figurent quelques noms de lieux (pas suffisamment, malheureusement) et surtout les courbes de niveau. Avec des photos d'écran et une bonne imprimante, on s'en servira comme fond de carte papier, assez pratique à conserver avec soi (on lit mieux le terrain sur un format A4 ou A3 que sur un écran minuscule de GPS ou de smartphone...).

2/ ACHEMINEMENT DU VELO
Un problème qui nous a pas mal tracassés et qui s'est finalement révélé assez facile à régler :

- On trouve dans le commerce des housses (220 euros pour une Bike Bag incl. Wheel Bags, modèle commandé par internet sur Bike Discount), adaptées pour le transport aérien (choix d'un des participants).

- En pratique, les autres ont opté pour un simple carton d'emballage (que vous fournira gracieusement, à condition de vous y prendre à l'avance, votre vendeur habituel de cycles), ayant servi à la livraison de VTT neufs. Moyennant quelques tours de clé rapides, pour diminuer l'encombrement du vélo et le faire rentrer dans l'emballage (sortir la selle, dévisser les 2 pédales ainsi que les 4 vis reliant la potence à votre guidon, dégonfler au besoin la fourche avant), et un peu de garniture pour l'intérieur du carton (vieille mousse de matelas de sol, protection à bulles, morceaux de carton, etc..., empêchant le vélo de ballote), on obtient en quelques minutes un colis robuste que l'on fermera moyennant du scotch de déménageur (et que l'on pourra éventuellement plastifier à l'aéroport, moyennant quelques euros ou dirhams - celui de Marrakech offre ce service dans le hall principal de départ -). Pour le retour, il faudra garder du scotch et prévoir sinon un moyen de stockage (les Marocains ont un sens pratique étonnant ; s'entendre par exemple avec votre guide accompagnateur, qui les fera suivra avec lui tout au long du séjour ou bien trouvera un coin pour les ranger en attendant la fin de votre voyage, chez un de ses amis ou prestataires favoris).

- Le coût du transport du vélo nous est revenu à 45 euros (vol aller) et 55 euros (vol retour). Attention à ne pas surcharger votre carton (à partir de 23 kg, on paiera au retour 100 euros et non 55...). A noter qu'il n'y a apparemment pas de solution évidente si l'on veut venir avec un VAE (les batteries sont interdites en soute) ; mais l'itinéraire ne se prête guère à leur usage (compte tenu des portages obligatoires qu'il comporte ici ou là)...

3/ ACCOMPAGNEMENT
Nous sommes passés par les services d'un guide marocain (Brahim Bénichou El Ouakhoumi), habitué des chemins et sentiers de l'Atlas et que nous avait conseillé l'un de nos amis (lui-même guide de haute montagne). Il peut être contacté par téléphone ou WhatsApp (00 212 6 68 87 44 34), ainsi que par mail (adresse : sentiermaras@yahoo.fr).

Sa prestation a été en tous points impeccable (3 premières nuits sous tente berbère confortable ; 3 nuits suivantes en gîte avec douche ; excellents repas chaque soir ; paniers-repas pour le midi adaptés et suffisants), avec une prise en charge dès l'aéroport (et une nuit à Marrakech) et 2 véhicules assurant la logistique, pour un tarif défiant toute concurrence ! Il a l'intérêt (outre le fait d'être montagnard, originaire de la célèbre vallée des Bougmez, au pied du M'Goun et d'avoir vraiment bourlingué d'un bout à l'autre de l'Atlas) de parler couramment le français et de s'adapter à toutes les requêtes. Seul bémol, il n'avait jamais pratiqué le VTT sur aucun des sentiers qu'il avait a priori sélectionnés et ne savait donc pas apprécier, précisément, leur pourcentage de roulabilité !

LES ETAPES

1/ DESCRIPTIF ETAPE 1
Nous sommes partis vers 14 h (c'est-à-dire que nous avons été lâchés en pleine nature, avec quelques indications sommaires d'itinéraire et des fonds de carte papier ou GPS approximatifs !), 3 ou 4 km (en venant de Marrakech ; on n’a pas eu le temps de mesurer précisément la distance...) avant le célèbre col routier du Tizi N'Tichka (2280 m ; compter 2 h 30 de trajet depuis Marrakech), au niveau d'un large vallon perché où jaillit une source sommairement aménagée (de nombreux chauffeurs de camions s'y arrêtent pour boire un coup ou faire le plein d'eau).

Nous avons pris alors la direction (hors sentier) du N-E, afin de gravir une modeste crête (très court portage) derrière laquelle le premier festival jouissif du séjour a commencé (zones dénudées - voir photos -, où l'on peut improviser assez facilement sa route). Il durera une petite heure avant que l'on ne retrouve une piste défoncée (donnant accès à un hameau de bergers), rejoignant au bout de quelques hectomètres, au niveau d'une maison forestière, la route de Telouet. Nous avons alors suivi celle-ci (goudronnée de temps à autre, pas encore partout), vers l'Est, pour passer au bout d'une poignée de minutes juste devant la maison d'hôtes Agdal (au niveau du village des Aït Ali Ouroho ; et première pause thé à la menthe bienvenue !).

Notre guide nous avait constitué un programme de fin d'étape exclusivement routier, pour rejoindre le campement aménagé aux portes du village d'Anmiter. Evidemment, nous avons cherché à trouver mieux :

- Avant Telouet, d'abord par un écart à droite de la route (auquel nous avons assez vite renoncé et qui ne présente pas grand intérêt en l'état), puis (à gauche cette fois de la route) par une piste conduisant d'abord à un village à flanc de montagne et à laquelle succède une courte série de sentiers en bordure de parcelles cultivées, en partie cyclables) ; nous avons atteint ainsi rapidement un large col où l'on retrouve une piste (d'abord vague, puis de mieux en mieux marquée). L'option de descente que nous avons choisie a été in fine décevante une fois rejoint le fond de vallée (passage scabreux en bordure de champs), mais il est évidemment possible de trouver mieux et roulable à 100 % ; n'hésitez pas à tenter votre chance différemment et à ne pas suivre fidèlement ma trace (notamment en tirant à gauche et non à droite au niveau du premier hameau rencontré, tout au début de la descente).

On retrouve la route non loin de l'entrée de Telouet (où elle devient alors parfaitement goudronnée) et on la suit sans difficulté en direction d'Anmiter. Au niveau du col annonçant la descente sur cette seconde localité, une piste monte vers la droite (en vue de pylônes électriques) jusqu'à un second col guère plus élevé, avant de redescendre doucement sur son autre versant. On ne tarde pas longtemps à croiser sur la gauche un sentier remontant en douceur un vallon puis dévalant superbement sur Anmiter (final en apothéose, malgré un ultime passage un brin chaotique - que l'on doit pouvoir améliorer car il n'est pas sûr que l'on ait choisi, tout en bas de la descente, la meilleure sente).

Remarques complémentaires sur cette étape 1

1/ Remarques générales : la première heure de l'itinéraire, ainsi que la portion sur sentier concluant l'étape, sont extrêmement intéressantes (et sans doute optimisées de mon point de vue). En revanche, de part et d'autre de Telouet et en explorant à fond la vallée, il doit être certainement possible d'améliorer le parcours (avis aux amateurs), en dénichant quelque sentier secret qui aurait pu nous passer sous le nez ! Par exemple en cherchant du côté sud de la maison forestière citée (on détecte notamment sur Viamichelin une piste qui parcourt les hauteurs de la vallée, dans une direction générale ouest-est parallèle à la route rejoignant Telouet ; peut-être ou sans doute cette piste doit-elle être aussi suivie d'un sentier dévalant jusqu'aux rives de l'Oued Maleh, dont les méandres se situent 400 m de dénivelé en dessous de son terminus apparent sur carte et photo aérienne…).

2/ Difficulté et engagement : rien de méchant à signaler pour cette première journée, qui se déroule dans un secteur où une route et des habitations ne sont jamais très loin et où les chemins sont assez peu exposés.

3/ Portage et praticabilité
Les sections de portage-poussage sont ponctuelles et ne sont pas du tout méchantes (parfaites pour soulager ses muscles). En cas de fortes intempéries ainsi qu'en plein hiver (présence alors potentielle de neige), il est par contre certain que les données du parcours ne sont plus du tout les mêmes (et accroissent très fortement les risques).

4/ Infos pratiques
- Telouet (localité relativement touristique, dont la célèbre Kasbah du Glaoui est un fleuron méritant absolument une visite) comprend diverses possibilités de couchage et de restauration (dont la maison d'hôtes Agdal, déjà citée et située 11 km avant le bourg).

- On peut donc découper au besoin l'étape en 2 et, si votre logistique n'inclut pas la possibilité d'un campement (comme ce fut le cas pour nous), faire une nuit avant Telouet (à l'Agdal) ou bien au village même et dormir le lendemain à Tighza (en fond de vallée et 4 km plus haut que Anmiter). Notre seconde étape, sur le chemin du splendide lac Tamda, y passe en effet et ce village perdu compte diverses possibilités, depuis le gîte traditionnel (au confort authentique et simple) jusqu'à l'hébergement d'un certain standing (gîte "babouche" comme dirait notre ami Brahim) tel que la Kasbah Oliver.

- Les coordonnées de ces différentes offres sont faciles à trouver sur Internet (la plupart des adresses sont renseignées ou distribuées par Tripadvisor, Booking... ; à noter de façon générale que le téléphone portable et internet sont ici d'un usage courant et fonctionnent à peu près aussi bien - et parfois même mieux - dans les montagnes du Maroc que dans nos massifs français ; de tous les services, c'est en tout cas celui qui est de loin le plus performant - alors qu'il y a encore plein de progrès à réaliser côté eau potable, desserte routière et traitement des ordures ménagères, par exemple).

Voir descriptif ci-avant.

Remarques

Voir descriptif ci-avant.

Voir descriptif ci-avant. Rien de bien méchant à signaler pour cette première journée (comme pour la sixième et dernière). Les étapes 2 à 4 seront d’un tout autre engagement...

Voir descriptif ci-avant.

Voir descriptif ci-avant.

Voir descriptif ci-avant.

Voir descriptif ci-avant.

Une ressource bibliographique utile pour qui veut cheminer dans l'Atlas : le Maroc (treks, randonnées, balades, culture, nature) de Vincent Geus (Editions de la Boussole anciennement ; Glénat plus récemment). Riche et très bien documenté (une bonne trentaine d'itinéraires de 2 à plusieurs jours, majoritairement situés dans le Haut-Atlas). Edité en 2017, il est la ressource documentaire papier la plus récente (et sans doute la seule à être d'actualité) sur les montagnes marocaines.